« Non, je ne conseille pas le métier du bâtiment aux jeunes aujourd’hui »

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Les points de vue, désenchantés, de deux ouvriers du bâtiment sur cette profession qu’ils ont exercé pendant une vie.

Oui, cela peut surprendre venant de la bouche de deux ouvriers, aux portes de la retraite, pour qui leur emploi dans le bâtiment a rythmé leur existence. Les conditions de travail sont pénibles et le secteur ne séduit pas. Pourquoi cette activité dont on admire encore aujourd’hui les œuvres ne captive pas au point d’être déconseillée par ses propres pratiquants ?

«Il faudrait que ça soit fini avant d’avoir commencé»

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C’est leur impression. Voilà ce que disent ces deux ouvriers chevronnés. Ils le connaissent ce secteur, ce dernier a rythmé leur vie, ce dernier est une part de leur vie, et pourtant… Ils ont l’impression qu’on leur demande de faire toujours plus, toujours plus vite. Cela peut être source de pression et peut amener à augmenter les risques sur un chantier, nous indiquait l’un des deux ouvriers interrogés. Ce sentiment peut-t-il être lié à un choix par défaut…

« Je vous le dis ce soir avec force, nous sommes ce peuple de bâtisseurs. »

Depuis le Palais de l’Elysée, le Président de la République Emmanuel Macron l’affirmait au lendemain de ce qui a été qualifié de « Notre-Drame » (Une de Libération, du mardi 16 avril 2019). La cathédrale de Notre-Dame de Paris venait de bruler et une vive émotion traversait alors le pays. Cependant, cette admiration pour la construction semble s’arrêter aux illustres réalisations. Hormis au détour d’un sujet dans les journaux télévisés, à l’occasion de conditions climatiques exceptionnelles, il est rare d’entendre parler des métiers du bâtiment. Et pourtant, son poids dans l’économie est non seulement réel, et considérable

« On m’a dit ‘’ hé bien, tu ne travailles pas bien à l’école, tu vas aller travailler’’ »

De prime abord, cela semblerait être le cas, ils ont tous deux admis ne pas avoir toujours voulu faire ce métier, il semble que celui-ci relève plutôt d’une décision à défaut : « On m’a dit ‘’ hé bien, tu ne travailles pas bien à l’école, tu vas aller travailler’’ » affirmait l’un d’eux, « à cette époque, c’étaient les parents qui décidaient ». Lorsqu’on lui demande l’âge qu’il avait, la réponse peut surprendre : « Je n’avais pas dix-sept ans ». Voilà 43 ans. Quarante-trois ans à « monter des moellons », quarante-trois ans à porter des sacs de ciments, quarante-trois à porter des sceaux de sable, quarante-trois ans à « tirer des tuyaux »… Cela explique peut-être leur réponse quant au conseil à donner à un jeune, hésitant. Cependant, cela n’est pas qu’une question de frustration. Malgré les difficultés et un sentiment de manque de reconnaissance, c’est un bien de la fierté qui a été manifestée.

Un secteur qui ne séduit guère

Malgré ce dynamisme et cette importance, la main d’œuvre du bâtiment manquerait. L’Onisep indique lui-même, un peu plus loin, que « Les besoins concernent les postes de maçon, couvreur et coffreur, où les candidats manquent ». Cependant, après deux entretiens réalisés séparément avec deux ouvriers du bâtiment en fin de carrière, à la question « Quel conseil donneriez-vous à un jeune qui serait intéressé par les métiers du bâtiment ? » La réponse fut unanime. « Non, je ne conseille pas le métier du bâtiment aux jeunes aujourd’hui ».

Le secteur du bâtiment : un mastodonte économique…

D’après la Fédération Française du bâtiment (FFB), dans une publication datant de Juin 2019 pour l’année 2018, « Le bâtiment en chiffres. 2018 », ce secteur comptait 394 000 entreprises, 1 104 000 salariés, 373 000 artisans – soit 1 477 000 actifs – et 140 milliards d’euros (hors taxes) de travaux. L’Onisep (Office national d’information sur les enseignements et les professions) présente ce dernier, sur son site internet, comme « l’un des premiers employeurs de France ».

La question du niveau de la rémunération

Le salaire, dit « débutant » (Onisep), pour un maçon, au début de sa carrière peut être une première clef de compréhension du malaise perceptible par les propos recueillis. L’Onisep indique qu’il s’élève à 1521 euros brut mensuel. Cela est le montant du smic (brut) 1er Janvier 2019, soit 10,03 euros horaire brut. Après quarante trois ans dans la même entreprise, de petite taille, l’en d’eux nous indiquait être payé 13 euros de l’heure, brut, à la fin de sa carrière, juste avant de partir à la retraite.

Le bâtiment, un secteur à risques ?

En France, en 2017, 120 ouvriers du BTP (bâtiment et travaux publics) ont perdu la vie des suites d’un accident de travail d’après la « Synthèse de la sinistralité AT-MP 2017 du CTN B. Industries du bâtiment et des travaux publics » d’octobre 2018. On constate cependant une baisse significative du nombre d’accidents du travail avec arrêt dans ce secteur, on en a dénombré 86 886 en 2017 alors qu’on en comptait 100 617 en 2013. La manutention manuelle a été, en 2017, la première cause d’accidents du travail (48,5%). Les chutes quant à elles ont été à l’origine de l’accident dans 30,9% des cas – 13,8 % de chutes de plain-pied et 17,1% de chutes en hauteur – l’outillage à main dans 14,9% des accidents.

« J’ai toujours été fier de ce que j’ai fait. »

C’est ce qu’a affirmé un des deux interviewés, un chapiste qui a dû laisser de côté la maçonnerie à la suite de problèmes de santé liés à l’usure de son travail. Peut-on imaginer un instant la fierté et la satisfaction de cet ouvrier du bâtiment, lui qui, désignant un édifice, partout où il passe dans les alentours de l’entreprise qui l’embauche, peut dire à son enfant : « tu vois celui-là, papa a participé à sa construction ».

Avenas Lucas

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